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Les livres et moi, mes coups de coeur, mes découvertes, mes créations ou mes voyages : intellectuels, spirituels, botaniques ou culinaires...

La diagonale du silence de Dany BOUCHARD (Editions du Rocher 2004)

La diagonale du silence de Dany BOUCHARD (Editions du Rocher 2004)

Luan est née en 1958 au Vietnam et, alors qu'elle est encore toute petite, elle est confiée par sa mère à un orphelinat catholique perdu dans le delta du Mékong, où elle est élevée dans la tolérance, l’amour et la sérénité.

Des années plus tard, en 1971, alors que la guerre fait rage, sa mère qu’elle ne connait pas mais qui est au courant de la situation du pays, la rappelle auprès d'elle, en France où elle s’est exilée.
En deux jours, Luan change de continent, de civilisation, de climat et de langue ! Elle découvre, une mère décevante, très froide et distante mais aussi, ce qui la réconforte, une grand-mère aimante.

En changeant de monde, Luan, petite adolescente naïve, élevée par des sœurs idéalistes à l’abri de la réalité du monde, se retrouve confrontée à une conjonction de circonstances qui vont la plonger dans un drame sans pitié... Mais ces évènements la rapprocheront  enfin de sa mère !
Victime de viol et coupable de meurtre, Luan va être contrainte à l’impensable, abandonner sa petite fille à la naissance. Des années de souffrance, de culpabilité, de non-dits et de solitude l’attendent.

Aujourd’hui, atteinte d’une sclérose en plaques qui la condamne au mieux, à court terme, au fauteuil roulant, elle passe quelques mois de repos, perdue dans un hameau au cœur du pays cévenol, dans la maison d’une amie.
Là, elle va confier à ses cahiers ce qu’elle n’a jamais pu dire à haute voix, l’humiliation du viol, le meurtre non prémédité du violeur (père de son enfant) et la souffrance de toute sa vie d’avoir eu à cacher tout çà, même à son mari,  et, pour ne pas permettre à la police de faire un lien avec elle et sa mère, la contrainte d’abandonner sa petite fille.

 

C’est petit à petit que le lecteur découvre cette tragique histoire très réaliste. Luan entre avec beaucoup de détails mais aussi de pudeur dans les évènements dramatiques de  sa vie, mais aussi dans les moments heureux. Le lecteur ne se sent jamais voyeur, il a même par moment l’impression d’être installé au coin du feu, ou face au jardin fleuri, et d’écouter ces confidences d’une oreille attentive…

Les évènements remontent à la surface de manière anachronique, et c’est ainsi que Luan nous les livre. Ils alternent avec la description de sa nouvelle vie dans cette maison perdue où elle va passer la fin de l’hiver et connaître le printemps, tout en assistant impuissante à l’évolution de sa maladie. Le lecteur ne peut à aucun moment la juger, car ce qu’elle a vécu est tragique et elle porte un regard lucide sur sa vie…

J'ai aimé ce roman intimiste et je l'ai trouvé tout à fait poignant. L’écriture est simple, dépouillée, pas littéraire mais poétique. Il est découpé comme un journal intime, jour après jour, et ce sont les petits détails de chaque jour qui nous permettent d’entrer si facilement dans l’ambiance. L’auteure ne tombe jamais dans la plainte même si l’écriture prend souvent le ton d’une confession. Moi qui ne suit pas croyante, je n'ai pas été gênée par les nombreuses références à la religion. 

Certains ne manqueront pas de trouver égoïste la démarche de Luan de dire la vérité à sa fille par écrit, alors qu’elle va mourir, et que celle-ci ne pourra jamais la rencontrer pour en parler. Il est vrai que c’est un lourd fardeau qu’elle lui transmet en même temps qu’un éclairage tout à fait cruel sur ses origines, sur lesquelles tout enfant adopté ne manque pas de se questionner un jour, même s’il est très heureux dans sa famille adoptive. Luan prend le risque de détruire son bonheur. Égoïste est également la démarche de ne rien avouer à son fils et à son mari. Elle fait tout pour les protéger et cacher ce qu’elle a fait, qui est monstrueux aux yeux de la société et qu'elle ne se pardonne toujours pas… Elle fait tout aussi pour leur cacher sa maladie et la fin qu'elle a choisi d'avoir.

L’auteur a dédié ce livre à sa fille adoptive dont la mère biologique était vietnamienne (=4ème de couverture  / Éditions du Rocher).

Est-ce une partie de son histoire qu’elle raconte ? Qu’importe !
Ce roman nous apprend beaucoup de choses sur le Vietnam, les croyances et coutumes dans les années 70 et le choc des cultures que tous les immigrés, venus de ce pays, ont vécu.
L’auteure, ancienne institutrice,  est plutôt connue pour son témoignage « Dans l’enfer des Témoins de Jéhovah » publiée en 2001 que pour ma part je n’ai pas lu.
Il est regrettable qu’on ait très peu parlé de ce roman lors de sa sortie. Il a encore beaucoup de succès en médiathèque aujourd’hui…et je pense que toutes les mères devraient le lire. Car à chaque page, il parle d’amour maternel et des blessures qu’il peut laisser lorsque la relation reste à jamais inachevée.

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J
<br /> J'ai beaucoup apprecie ce livre. Je suis Europeen vivant au Vietnam et j'ai ete captive par la facon dont l'auteur nous fait participer a son experience de vie. Cette facon d'ecrire ne peut etre<br /> rien d'autre que son auto-biographie!<br />
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